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Née en 1976 à Paris
vit et travaille là où elle vit et travaille, 
 collectionne et accumule les souvenirs, les siens et ceux de son entourage.

Liesses quotidiennes, intimistes et débridées en apparence futiles qui interrogent et dérangent; dans ses pages d’écriture,
elle inscrit des notes personnelles comme autant de questionnements et exhibe délibérément sa perception susceptible à travers
ses histoires vécues et ses doutes; par l'image, elle taxidermise des instants réels ou rejoués.

 

Clémentine Corbeil-Obst 2013-2019

RELIQUES ET RENCONTRES

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P E T I T E S 
E T  G R A N D E S  A N N O N C E S

Affichettes scotchées dans la ville,

messages détournés à tonalité caustique abordant
des faits de sociétés tels le travail, la solitude, la précarité,
la maladie. Impressions en noir et blanc, formats variables
.

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KAMASUTRA-CHAIRS

Tirage couleur numérique_A2 impression sur papier  mat/ à 10 ex.

 + tirage format carte postale, noir et blanc,

Editions Salon du Salon

 

http://www.editionsdusalon.com/

" S E   F O N D R E   D A N S   L E  D É C O R  "

«Se fondre dans le décor pour ne plus être visible» 

En posant devant un mur couleur chair, c’est à se demander qui habite la peau de l’autre.

L’ouverture est là; il suffit simplement de se retourner pour y voir autre chose sans jamais se montrer.

Ces deux pans de photos exposés en vitrine ne sont pas sans rappeler la désuétude des boutiques de lingerie dans les ruelles étroites de Rome où chaque article épinglé avec soin a son importance et son prix. La tapisserie est réversible sans envers ni endroit. Dressée de nostalgie, j’expose le temps qui passe comme si le reste, immuable, n’avait pas pris un seul pli. 

http://pasvu-paspris.fr/

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P A P E R  W A L L

600 messages sur papiers colorés.
Une invitation à lire et à m'écrire. L'installation de départ ainsi chavirée par les allées et venues est en mouvement permanent.

Bauhaus - 6 rue Chenoise, Grenoble

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V I V E   L E S   V A C A N C E S​

Triptyque "vive les vacances"  Installation.


Le dernier acte consistait en une tombola proposant de gagner une nuit pour deux au camping "Le Panoramic" à Telgruc-sur-Mer (Finistère). Dispositif : boîte à lettres, carnets à souches et stylo bille sur socle.

https://vimeo.com/37390435

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AT WORK 

L’idée de faire un travail sur le travail m’est venue après des années
de recherche comme «demandeuse d’emploi».
L’intitulé -maquette de presse- est devenu ‘ma quête depressed’


Devenant travailleuse fictive,
j’ai entre aperçu l’univers d’un lieu de travail, soit
la relation à l’activité / attachement-détachement - rôle
la position / physique-psychologique - geste et attitude
l’apparence / tenue - «détenu» - (re)présentation_codes vestimentaires
l’implication / engagement-dégagement - responsabilité
le sentiment d’être / liberté de 1 à 10 - état

 

Proposé sous cette forme :
«Je vous invite à m’inviter sur votre lieu de travail»,


J’interroge en réalité ce qui fait vivre.
Le travail devenu plus largement une nécessité
qu’un baromètre d’épanouissement est l’endroit où la sphère privée est exclue.

Généralement, se faire photographier sur ce terrain-là devient sensible,
comme si l’on pénétrait une zone intouchable.

Cependant, la transgression va amuser, déconcerter ou révéler
un travailleur «hors service», que j’interromps en lui confiant un appareil photo.

afin qu’il me voit à sa place.

 

Cette série de photos est donc réalisée 
par toutes les personnes qui ont accepté de m’inviter
à travailler à leur place.


 

Capture d’écran 2020-05-12 à 12.34.40.

NOUS SERONS BIEN NOUS SERONS DEUX

Invitation libre à poser. Chacun(e) me confiant un secret, un souvenir.
Ici-même avec D. en convalescence après une opération de la gorge.
8 volets couleur et noir et blanc, F: 15x15.
 

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-MENS SANA-

IN CORPORE SANO

‘Un esprit sain dans un corps sain’ demeure très flou et c’est ce qui est démontré à travers des images que l’on devine être des portraits qui s’échappent d’eux-mêmes. Derrière cette mise en scène assez aléatoire, l'expérimentation par le mouvement et à vitesse lente de relents de visions chimériques, où le corps comme hors de lui semblerait se détacher de lui-même pour refléter les agitations mentales d’une âme au demeurant - invisible -

Triptyque noir et blanc.

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ENTREBAÎLLEMENTS SUR UNE LIBRE INTERPRÉTATION DU FANTÔME

 DE LA LIBERTÉ

Action d'ameublement d'Eric Madeleine tiré de la scène du film de Luis Buñuel. 11ème nuit européenne des musées : Musée de la chasse.
Avec Arianne Foks et Vincent Labaume.

 

Extrait séquence : https://www.dailymotion.com/video/x22pj33

A LA MANIÈRE DE CHANEL

Partant de l’idée que toutes les femmes pouvaient être l’égérie de Chanel,

je les ai invitées à poser chez elles dans la même tenue (une tunique ample et des bas clairs). L’affiche publicitaire tirée à plusieurs milliers d’exemplaires se transforme en icône unique, où ce n’est ni le vêtement ni l’accessoire qui est mis en avant mais le modèle, dans toute sa singularité, échappant ainsi aux codes de l’univers de la mode. Le logo de la marque inscrit massivement sur chaque portrait ne fait que brouiller la visibilité du spectateur dans sa posture de consommateur et de personne. Chaque photographie a pour titre son numéro de fichier numérique. Techniquement, le contre jour lisse les corps et les peaux, mais les poses exhibent avec une certaine pudeur la maladresse de la mise en scène et de la prise de vue.

Tirage couleur numérique_ 1/10 portraits. 

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CHAMBRES À COUCHER

Cinq visites de courtoisie chez des hommes célibataires de mon entourage,
ainsi répertoriées : (Lieu / Horaire / Date)

rue Menon (14h-15h), décembre 2012.

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Il a ouvert la porte en débardeur, short ample et claquettes; un balai serpillère à la main, s'empressant de dire 'je vais prendre une douche rapide et je reviens'. Nous avons discuté dans la cuisine; il buvait du café en fumant et m'a servi une tasse de thé vert tout en continuant de nettoyer. J'étais venue avec l'intention de le photographier mais le soleil avait disparu, alors j'ai fini par enregistrer sa théorie sur la deuxième mort, la présentation de ses auteurs majeurs du moment, Napoléon (comparé à Hitler) et Edward O. Wilson. Je lui ai confié ma caméra. J'ai trouvé étonnant qu'il fasse sécher du linge dans sa penderie. Il m'a parlé d'intrusion féminine, terminant par plan fixe sur une porte condamnée. Je lui ai montré deux vidéos sur son ordinateur puis j'ai survolé l'acte 1, 2 et 3 de son film dans le film.

BONS BAISERS D'ICI

Recueil de cartes postales trouvées dans une valise
sur la chaussée. Cette collection retrace les échanges épistolaires

d’une famille vivant en région parisienne
dans les années 60.

AUTOPORTRAIT
A LA MANIÈRE DE

Exercice de style.

Autoportrait à la manière de Édouard Levé.

70 pages, Format personnalisé

Couv : A! http://www.aiuto-aiuto.fr/

Je fais des points

sur mon atlas de poche pour me souvenir où je suis allée. Je ne comprends pas pourquoi les gens ne retirent pas systématiquement leurs chaussures lorsqu’ils pénètrent un espace intérieur. Je trouve les Français râleurs, coincés et mal élevés. J’ai un certain plaisir à faire des généralités. Je n’ai pas besoin de consommer de la drogue pour être dans un autre état. C’est plus une question d’envie et de circonstances. Je me suis déjà fait suivre et j'ai déjà suivi. Je ne suis jamais rentrée dans un sex-shop. La prostitution me pose un problème, pas l’euthanasie. Le pape tient des propos assassins. Manger à même la casserole me donne un sentiment d'extraordinaire liberté. Je parle la bouche pleine. Je parle la bouche vide. Quand j’étais gamine, je me disais qu’en grandissant je prendrais du poids, des formes, j’attends toujours. Je n’ai jamais coupé un arbre, d'ailleurs je ne me trouve pas assez manuelle. La calvitie chez une femme me touche plus que chez un homme. Je place rarement un aliment dans le frigo sans le couvrir. J’ai contracté deux fois le vers solitaire. Une fois, la salmonelle. J’aime la galette des rois. J’aime surtout avoir la fève. Je me répète. Je me répète. Échos.

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AUTOPORTRAIT À SA MANIÈRE À ELLE

" Ce livre , on dirait un livre pour les enfants du collège"

J’ai lu certains passages de - Autoportrait à la manière de -
à June alors âgée de 6 ans 1/2. Ses réactions apparaissent en Italic. Format A5 / 30 exemplaires, 20 pages

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Quand quelqu’un me révèle un secret, je ne sais pas quoi en faire.

T’as qu’à le dire à un autre copain et il va te le dire. Voilà.

 

 J’aime bien porter des vêtements d’occasion que je donne ensuite. 

Si on aime bien les affaires des autres, on les prend.

 

Tous les deux mois environ, je change la disposition des meubles.

Il faut changer parce que des fois, on dit que c’est un peu moche.

 

Quand je cuis un œuf dur, je pense à mon ex belle-mère. 

Hi hi hi. Parce qu’on dirait que ça sent mamie D.

 

J’évite de roter et de péter en public. 

Quand on travaille, on fait des prouts, et quand on ne travaille pas, on ne fait pas de prouts.

 

J’ai toujours pensé qu’écrire dans une villa en Italie me donnerait plus d’inspiration.

Des fois on n’a plus d’idées, des fois on a pas beaucoup d’idées.

C O N F E S S I O N S 

d'une hôtesse américaine

Interview et retranscription, 72 pages 

Là, tu parlais de toutes les manières pour éviter les contacts trop physiques c’est à dire les contacts de peau à peau.

 

Ouais, et aussi j’étais en train de parler de pourquoi cela ne me dérangeait pas qu’on me touche par dessus mes vêtements même si c’était mes cuisses, mes seins ou mon ventre ou mes hanches. Même si je ne laissais jamais remonter la main plus haut qu’à un certain niveau des cuisses. Et pourquoi je sentais ça ni comme étant excitant, ni comme étant avilissant ou me rendant sale, où en fait j’avais l’impression qu’il y avait un truc un peu de psy où tu écoutes les gens, tu leur prêtes oreille, mais c’est de trouver la juste distance pour ne pas être impliquée toi émotionnellement. Tu es là pour permettre à l’autre de pouvoir parler. Et là, c’est un peu pareil, tu es là pour permettre à l’autre de pouvoir toucher mais ça n’est pas toi. J’avais l’impression que ce n’était pas moi qui touchait. D’une part parce que je n’étais pas là en tant que moi-même, j’étais là en tant qu’un personnage et c’était ce personnage-là qu’ils venaient toucher, ce n’était pas moi. Je prêtais, je me prêtais à un jeu où j’étais une simple enveloppe, enfin, je n’étais pas concernée. Ce qu’il touchait ce n’était pas moi, ce n’était pas mon corps, ça aurait pu être n’importe qui d’autre. Ce n’était pas ma subjectivité, mon individualité qu’ils voulaient toucher. J’étais comme un écran, je devenais une surface de projection et je prêtais corps à quelque chose d’autre.

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exercices d'extinction

 " Un jour bientôt, un jour peut-être,

je m’isolerai du reste du monde pour ranger mes idées. "


Une pensée pour Sandra Moussempès, mai 2015

30 exemplaires. 20 pages

PENSÉES IMÉDIATES PRESQUE TACTILES

-


«Dis-moi tu», ça m’évitera de penser que je peux être plusieurs».
Comme un écran entre nous mais que nous soyons deux ou plusieurs dizaines cela ne change pas grand-chose. La transparence est ce que l’on montre de moins aussi je vous écris comme si vous ne faisiez qu’un.

Double sens de transparence : 
le sens moral: "je suis transparente avec vous", c'est à dire qu'on ne cache rien, soit-disant, qui est, en réalité un ensemble de projections tout à fait opaques. La transparence ne peut, par définition, se montrer. Elle ne peut être que déduite. Aussi la transparence n'est pas l'absence, c'est-à-dire qu'il persiste bien quelque chose "entre nous", quand bien même on ne peut en montrer la transparence autrement que par ce qu'on en déduit - le sentiment de (laisser) toucher au vrai. Aussi quand quelqu'un me dit, "je suis transparent avec toi", j'entends "il y a un obstacle entre nous" (aussi invisible soit-il...). V. Piotrowski

Les ‘Pensées’ sous forme de journal intime, retracent jour après jour les évènements et rencontres d’un double-vide : un homme seul derrière sa fenêtre regarde une femme seule derrière sa fenêtre. La fenêtre est ici remplacée par l’espace fictif de la messagerie privée. Les pensées se substituent aux images qui elles-mêmes se substituent aux émotions jusqu’à se confondre à des invitations presque privées «Je vous invite à m’inviter, je vous invite à m’envoyer, etc...», cherchant volontairement et involontairement à créer une forme de lien...

 

Livre-Objet, 276 pages, format A4

Couverture sérigraphiée. (30 exemplaires)

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Autoportraits réalisés avec le retardateur de l’ordinateur (Photo booth)
entre 2016 et 2017, et faisant l'objet  de portraits d'étude pour l'artiste peintre Juliette Lemontey. 
 

JE T'ATTENDAIS

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25 x 60 - gravure sur plaque d’aluminium_ typo Futura sur 1 ligne

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SÉPARATIONS

3 boîtes contiennent distinctement plusieurs mois de poussières aspirées.

2002, 2010, 2011 correspondent à des ruptures amoureuses...

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Cadres en bois avec sous-verre 185x135x75

poussières, clous, cheveux, papiers, plâtre, copeaux divers

ARCHÉOLOGIE AMOUREUSE

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Savons dimensions variables. 

8 mois

SANS FARD

Clémentine pose et répond

Qui êtes-vous ?
Un glissement de ma personne devant derrière un personnage inventé,
un clin d'œil à mon nom français puis allemand, un pseudonyme validé par une amie turque. 

Avez-vous besoin de validation extérieure ?
Oui, je crois, quand je doute je laisse reposer le choix ailleurs.
Comment êtes-vous venue jusqu'ici ? 
Par mes propres moyens.
Vous êtes floue dans vos réponses.
Lorsque je trouve les questions brutales. Oui 
Ces questions sont pourtant simples. 
Alors je ne le suis pas ou le contraire.
Vous jouez souvent sur les mots ?
Il m'arrive pour me défendre, de contourner.
Vous vous sentez attaquée en permanence on dirait ?
Non. J'ai besoin d'être en confiance et de sentir de la bienveillance. 
Directe vous l'êtes, dans votre manière d'aborder certains sujets.
C'est vrai, je dois agresser ce qui m'agresse moi-même. 
Qu'est-ce qu'une personne rassurante pour vous ?
Une personne qui est claire dans ses propos et ses intentions. Une personne qui ne me bouscule pas.
Une personne gentille sans arrière-pensées.
Votre zone de confort est un refuge. Le refuge c'est l'isolement. 
Probablement mais pas uniquement. 
Que cachez-vous ? 
Je dois cacher quelque chose oui mais quoi ? 
Ne pas montrer, pour vous c'est...?
Avoir honte être gêné se protéger, enfouir. Être discret, timide maladivement timide.
De quoi avez-vous honte ?
J'ai honte de voir comment fonctionne l'être humain dans ses travers, sa folie. 
Vous considérez-vous comme adulte ?
Légalement non. Illégalement oui. Être adulte c'est à la fois être responsable et imbécile. Je n'aime pas les adultes qui ont perdu leur aura d'enfant.
Et les enfants ?
Ceux qui ont des attitudes d'adulte me fascinent et m'effraient en même temps.
Vous avez des avis contraires. Pourquoi ?
J'ai le sens de la contrariété, envers moi aussi. 
Ce n'est pas paisible au quotidien, n'est-ce pas ?
Ça dépend du type de contrariété, ça peut être drôle. 
Et ça peut ne pas l'être; qu'est-ce qui vous met en colère ?
La colère, les excès, les déceptions, la bêtise humaine, le mépris, l'indifférence expressive, la manipulation.
Êtes-vous engagée quelque part ?
Oui dans ma vie privée. Et puis dans ce que j'entreprends à mon rythme. 
Comment vous faire confiance ?
En me laissant tranquille. En me laissant être.
Comment recevez-vous les critiques ?
Cela dépend de la personne, du contexte. Les bonnes je ne sais pas quoi en faire,
les mauvaises me tourmentent ou me font avancer. 

Avancer c'est important pour vous ?
C'est important de sentir une évolution quelque part, un mouvement quel qu'il soit.
Avoir le sentiment de ne pas avancer fige davantage. Trop d'immobilisme atteint le moral. 

Êtes-vous une personne optimiste ?
Apparemment j'aurais tendance à voir le côté obscur des choses;
je ne m'en rends pas compte; c'est que je t'entends. 

Êtes-vous influençable ?
Influencée par émotion certainement. Influençable, oui et non, j'ai besoin de savoir ce que les autres pensent d'une situation ou d'une autre. La mienne la leur...
Que faites-vous de toutes ces pensées ?
Je les archive les garde en mémoire ou les écris.
Et ensuite ?
Rien, je cumule, trie, stocke, contiens, verrouille, range. Je passe mon temps à ranger.
Vous êtes concernée par la vie des autres. Mais la votre de vie, qu'en faites-vous ?
Je la vis au ralenti pour mourir mieux. 
Vous pensez à la mort ?
Non. À la vie. En épargnant tout regret ou toutes décisions avortées, en m'entourant
de personnes sensibles; fragiles ou fortes en dedans en dehors, qui ne trichent pas.

Votre instinct est-il fiable ?
J'ai une sorte d'acuité pour deviner ce qui va me blesser ou me panser, alors parfois
je force parfois j'abandonne. 

En ce moment ?
Je force mollement les contraires pardon les contraintes, non les 'polarités', enfin quelque chose d'inconfortable et ça, me prend beaucoup d'énergie. 
L'énergie vous la trouvez...?
En dormant, je dors beaucoup, j'ai besoin de récupérer; et récupérer c'est aussi rassembler ce qu'on a oublié ou perdu. 
Qu'avez-vous perdu ou oublié ?
Du temps. 
Vieillir pour vous, c'est...?
Se rapprocher de la vérité, moins se mentir.
Quelle est votre perception de l'intime ?
C'est une fabrication mentale qui varie selon des codes ou des normes. Les codes et les normes saccagent la singularité. C'est aussi un espace qui se préserve de l'extérieur.
Pourtant vous mélangez ces sphères, du moins vous les entrelacez.
Oui j'entrelace je tisse, surpique.
Ça n'est pas sans risque, confus?
C'est idiot comme question. Je ne vis pas en meute. Nous ne sommes pas aux commandes du désir et du délire des autres; c'est à chacun de gérer ses débordements au mieux. Qui n'est pas confus dans ce qu'il transporte ? Volontairement et involontairement. Le manque de risque c'est l'aplanissement de tout. L'excès de risque, la perte de soi. Il faut un juste à côté.

- Novembre 2018 -

VOUS

Présentations, 2013-2019

LIV MATHILDE MÉCHIN

Liv Mathilde Méchin explore la matière au sein même de l’image. Dans ses photographies, elle illusionne le spectateur qui se plonge non plus dans les effets visuels que l’image procure mais dans la trame 

de l’objet photographié. Les tissus qu’elle conçoit et avec lesquels elle travaille, imbibés d’éléments en apparence neutres tels l’eau ou la lumière, revêtent des formes étranges, organiques qui créent à leur tour d’autres formes et procurent  une sensation au-delà de la parade optique. Les plis forment des vagues et ce mouvement de ressac trouble la perception. Elle parvient à nous faire rêver au-delà de qui est montré, et nous invite à toucher avec les yeux un drapé ondulant, chatoyant proche de la mécanique de Ciotto dans son art cinétique. L’image s’écoule, humide, dégoutte.

 

C’est un jeu, un détour, une mise en scène de ses matières premières, brutes, souples et soyeuses : des tissus dépareillés de toute tonalité, nu, pudique mis en avant aussi sobrement que noblement. Désigner textile de formation, sa démarche épouse à la fois les codes de l’artisan-tisserand, ceux du chimiste en laboratoire, et de l’ingénieur-chercheur en image de synthèse. 

L’exploration est là avec tous ses contrastes anachroniques. C’est une quête du visible dissimulé, celui du mouvement en apesanteur, une tangibilité qu’elle renvoie subtilement à l’acuité de chacun.

 

Pour ‘150 shades’, elle a recours au tissage photographique, une technique convertissant une image en 73 tons dégradés; technique, créée par son collaborateur et associé Come Touvay. 

Ceci afin d’obtenir un maximum de subtilités dans le rendu et la retranscription de l’image grâce à un logiciel spécifique pour le design textile. 

Hormis la gestion des contraintes techniques cela assure une simulation du matériau avant sa réalisation, en son endroit comme en son envers. 

 

«Parce que l’entendement joue un rôle dans la perception des choses, l’illusion peut s’intercaler entre la matière, soit ce qui est donné, et la forme, c’est-à-dire ce qui est pensé.» Alain.

De prime abord, on perçoit une image imprimée sur tissu alors que celle-ci fait partie intégrante du tissu. 

Le tissage n’est pas photographié c’est la photographie qui est entrecroisée de fils dans un processus similaire au filage dans l’étendu de son élaboration.

 

Tissage photographique allie ainsi tous ces savoir-faire ténus qui ne dénouent pas avec les gestes ancestraux du tisserand mais qui s’en accaparent fidèlement via des outils numériques aussi factices que réels. Les œuvres surgissent invraisemblablement et deviennent fortement visibles dans leur apparence et non dans leur essence. Une impression doublée d’unicité. 

FANNY GOSSE

Ressusciter des souvenirs avec de la couleur et des gestes fins n’est pas rien. L’intervention manuelle de l’artiste réanime, par le passage d’une seconde couche, la dite fixité des photographies corsées de réalisme. Est tangible, ce qui donne accès à ce que l’on perçoit, une preuve d’existence devenue réelle à force d’imaginaire. On ne rêve pas ce qui est mais ce qui manque. Chacun de ses personnages ou éléments urbains sinon marins est révélé d’une manière ou d’une autre, par effacement, recouvrement, remplissage ou accentuation. Plus qu’une série de ‘coloriages-photos’ c’est l’expression libre et intense d’une mémoire re-configurée avec des scènes de mœurs où apparaissent des êtres, des lieux-chers-familiers-inconnus. Une histoire narrée sensiblement puisqu’elle est sienne par constellation. Une intimité lacérée ou entachée avec délicatesse, qu’elle montre sans pourtant tout exposer parce qu’il y a de la pudeur, de l’intention; de la neige en été, des draps de survie, et rarement l’ombre d’un regard dévêtu. Un voyage rétro-actif d’une belle intemporalité entre ici et là-bas, sa ville d’origine.

Enfin ceci, cela, elle vous le dira avec ses mots choisis, droit dans les yeux. Un signe évident de considération et de présence. Un bon artiste c’est comme un bon médecin, qu’il soit allopathe ou alternatif, étroitement ou largement expérimenté, s’il ne vous regarde pas attentivement lors d’une consultation. C’est mort, vous pouvez immédiatement repartir.

ISABELLE MILLET

« C’est toi quand t’étais p’tite? je pose la question j’aurais juré, et ces parents avec leur nouveau bébé, j’ai un doute. La vie des autres est celle aussi de Isabelle M qui accouple des diapositives trouvées dans une valise abandonnée avec l’improbable destin d’être exposées dans les anciens vestiaires de la SNCF. Images restantes, voyage en teintes douces, revêtements pop. tendresses surannées; où même le paquet de Gitanes négligemment posé sur la table lasse revête un aspect poétique (zoom). En alignement, c’est l’histoire recomposée d’une famille de la naissance à l’amour que l’on adopte au fil du regard; que l’on cueille par transparence sans le ronflement du projecteur mais avec tous ces pistils de souvenirs. »

ANA APOSTOLKA

Enquête minutieusement sur l’éphéméride novembral de Ana A. où le temps se lit à l’envers comme à l’endroit, des pièces à conviction comme autant de circonvolutions lentes, d’indices forts : le ciel se sépare en trois, une enfant déguisée en princesse joint ses mains à celles d’une autre, elles jouent- le bras s’étend le doigt montre la mère flashe les bus allongés côte à côte. C’est la nuit à Skopje au son des réverbères, un chien promène une femme en laisse une jument greige vous fixe derrière un grillage, muet, c’est le jour partout ailleurs dans l’œil d’un garçon une teinture au henné un terrain de basket des rochers en effusion, un portrait industriel au confluent du Danube et de la Save, des branches rousses des oiseaux viciés et cette inscription à la bombe KAPITALISMUS TÖTET.

 

NICOLAS HUBERT

Hier ce soir encore, une chorégraphie sensible sensitive et fraîchement contemporaine sur le plateau-théâtre du 145. Deux corps un seul, animal animé au sein d’un espace spartiate néanmoins immense, une pièce cuisine, projetant des ombres à l’est de la scène façon west side, évoluant tel un golem pour s’étirer se résorber puis disparaître et renaître sous une forme à priori évoluée, l’homme. Un duo dit-on dans la création, un couple, dans la vie. Être ensemble n’est pas être qu’un mais deux fois une personne. Les femmes affirmait Michaux, sont de la colle, c’est Alain Jouffroy qui plaisantait avec ça pendant le dessert. Ici la femme n’est pas la glu d’Henry, Elle, avec ou sans l’homme défie l’attraction le vide le plein l’apesanteur, c’est une série d’envols de mises en liberté, de quêtes, vulnérable et précise. Hubert soutient la moindre parcelle de chute, absorbe les contraires, elle sur lui campée en hauteur mimant l’érotisme premier, et afflue sur d’évidentes constitutions, est porté le plus léger par le plus fort. Et non le faible, sinon dans le sens du cueilleur. Un batteur métronome, un jeu avec les ondes radiophoniques, un saut dans le temps où les membres se déploient se contorsionnent avec ferveur ou accident. 

Elle est là cette justesse chorégraphique, dans le fragile instant du geste qui somnole, dans le corps qui épuise le sol. De la danse vraie et pas autre chose. De la danse accompagnée par un fan de Blue Note. 

À ôter le terme -pluridisciplinaire-, en vogue depuis que celui de -transversalité- s’est asphyxié. Terme partout présent comme s’il n’existait plus qu’un seul moule expressif. De la danse avec de la poésie du cinéma du son. Elle rien qu’elle.

MAVI BOIANO

Quand nous nous sommes rencontrées en 2010, Mavi était animée par l’étrange univers de Dino Buzzati et je l’ai vue frayer son chemin en posant les jalons d’une esthétique hybride et surprenante mêlant figurisme et abstraction. J’ai aperçu le papier raclé à l’encre, les motifs apparaître et disparaître, les retouches ici et là au feutre fin ou au stylo à bille. J’ai parcouru ses carnets personnels et collectifs, ses livrets uniques, je les ai regardés de près et de loin comme si je cherchais à comprendre pourquoi, comment. Comme si je voulais saisir ce qui se tramait derrière cette alchimie de formes singulières et de couleurs sobres.

Pourtant, malgré la rencontre, les questions et les réponses, le silence, nos échanges et nos collaborations, ce qui était montré ou suggéré avec humour, sentiment et nostalgie, je ne suis jamais parvenue à définir le mystère qui se logeait derrière chacune de ses œuvres. Et quand elle m’a demandé avec confiance et complicité d’écrire quelque chose qui présenterait son travail et sa démarche, j’ai d’abord été préoccupée. 

Réalisant soudainement que l’amie souriante, la femme chaleureuse et déterminée ne faisait qu’une avec l’artiste secrète, subtile et philanthrope s’exposant plus volontiers dans les lieux publics en lien avec une vie de quartier, que dans les lieux privés emprunts de salutations convenues. Abécédaire d’émotions, recueil de traces de pinceaux, tout est affaire de recherches incessantes chez Mavi, comme si elle composait à voix haute et imprimait directement son énergie sur ses supports d’expression.

C’est dans un rythme soutenu et vivifiant qu’elle conçoit ses œuvres graphiques, laissant de côté ses premiers amours avec la restauration. Et c’est en s’autorisant tous les écarts possibles pour réfléchir à sa pratique, qu’elle s’est approprié les savoir- faire de la sérigraphie. Mavi laisse émerger des œuvres parfois minimalistes hantées de signes raturés, pointillés, géométriques comme pour brouiller les pistes. 

Le hasard et les coïncidences font partie du jeu, de son jeu: des coulées d’encre comme autant de blessures involontaires, des éclats de peinture, des glissements de papier au moment de l’impression. Entre maîtrise et gestes accidentels, elle trouve la juste voix pour que ce ne soit ni trop, ni pas assez. Son travail n’est pas là pour séduire mais pour exprimer un vif ressenti. Elle réside à Utopia depuis 2009, un collectif d’artistes où l’échange et la rencontre permettent l’émergence de travaux communs, de quoi nourrir le cours des ses recherches et de ses perceptions. Enfin quoi qu’il en soit, que le travail de Mavi évolue seul ou avec d’autres, de manière sauvage ou docile, le mystère persiste, et peut-être est-il préférable d’en rester là sans rien soulever, sans chercher à en savoir plus. 

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